Ouest Rance

Tout était annulé. Pour la première fois, les murs de la ville étaient nus. Plus d’affiches, plus de pubs criardes, plus de grosses affiches dominantes de hip-hop commercial, rien à vendre, rien à proposer. Une aubaine pour l’affichage sauvage. Dérisoire, il trouvait là un espace discret, presque naturel. Dans les rues, les gens masqués s’évitaient. Ils pressaient le pas, la peur de l’autre inscrite dans leurs gestes. Chacun surveillé, contrôlé. Difficile de se déplacer, de jouer, de plaisanter, de déborder. La ville n’était plus à nous, comme un territoire aseptisé. On y circulait en silence. Pas moyen de s’y résoudre, il fallait faire quelque chose. Se balader sans raison, faire le pitre, s’en moquer, être léger, idiot même, juste pour narguer la situation. Trop potache, parfois vulgaire. Mais c’était nécessaire.
Il fallait reprendre ces murs, comme avant. Juste pour faire. Pour être là, bêtement, et réaffirmer que, malgré tout, cette ville m’appartenait encore, que tout cela finirait par passer.